La résidence alternée est un mode de garde qui permet à l’enfant dont les parents sont divorcés de vivre en alternance au domicile de l’un et l’autre de ses parents.
Pourtant reconnu par la loi du 4 mars 2002, ce nouveau partage de l’autorité parentale est loin de faire l’unanimité.
Le débat fait rage chez les spécialistes : sociologues, psychologues, pédopsychiatres.
Alors, la garde alternée, un bienfait pour l’enfant et pour ses parents ou un véritable danger surtout pour les plus jeunes ?
La résidence alternée, un bienfait pour l’enfant et pour ses parents ?
Quelles que soient les circonstances du divorce, toute séparation engendre chez l’enfant, de la souffrance. Faisons donc en sorte de réussir la séparation pour que la douleur soit atténuée et ayons toujours à l’esprit que ce sont les parents qui divorcent.
Si l’on considère que l’enfant a besoin de ses deux parents pour s’épanouir et pour grandir, que leurs rôles sont tout à fait complémentaires, alors la résidence alternée répond bien à cette situation.
La résidence alternée permet à l’enfant de conserver ses deux parents à égalité. Il n’y a pas un parent principal, celui de la semaine qui punit et puis un parent occasionnel, celui des weeks-ends et des loisirs.
Ainsi, l’enfant ne se sent pas rejeté par l’un ou l’autre de ses parents, au contraire, il est attendu, accueilli, il se sent désiré et le maintien de cet équilibre fait qu’il n’a pas l’impression d’avoir perdu l’un de ses parents.
Pour le sociologue Gérard Neyrand*, spécialiste des mutations de la famille, la résidence alternée apparaît comme la solution la plus efficace pour concilier l’intérêt de l’enfant et le droit des deux parents.
L’enquête qu’il a réalisée auprès des parents et des enfants concernés par ce mode de garde fait apparaître un bilan positif.
Les enfants interrogés apprécient la vie auprès de leurs deux parents car ce mode de garde « permet de maintenir le contact régulier avec les deux parents ».
En plus, le fait de vivre dans deux foyers et de partager deux modes de vie différents apporte à l’enfant une ouverture d’esprit et un enrichissement incontestable.
Les parents aussi y trouvent des avantages. Finie la frustration pour l’un et la surcharge pour l’autre. Désormais, chaque parent dispose de plus de temps pour effectuer ses démarches, pour s’occuper de sa vie personnelle, pour éventuellement faire évoluer sa vie sentimentale. Plus besoin pour l’un des deux de sacrifier sa carrière professionnelle.
Le parent qui reçoit l’enfant se trouve plus détendu, plus disponible, plus à l’écoute et on se rend compte que ces conditions sont très favorables à l’enfant.
Toutefois, la résidence alternée a ses contraintes, souvent d’ordre matériel et financier.
Selon le sociologue « la résidence alternée peut être viable dans la plupart des situations mais elle ne sera possible que si certaines conditions sont remplies » :
un minimum de communication entre les parents. On ne demande pas aux parents une entente parfaite mais simplement de savoir dialoguer. Même si le couple conjugal n’existe plus, le couple parental doit continuer à fonctionner dans l’intérêt de l’enfant.
la proximité géographique des deux parents : on ne demande pas aux parents d’habiter la même rue mais il est important que l’enfant conserve ses repères, puisse aller dans la même école toute l’année sans avoir à subir de longs trajets.
Si ces conditions ne sont pas remplies, la résidence alternée est vouée à l’échec.
La résidence alternée, un danger surtout pour les jeunes enfants ?
Selon les pédopsychiatres, tel que le Docteur Berger, la résidence alternée n’est pas la moins mauvaise des solutions comme le disent avec facilité certains spécialistes. C’est un système qui peut engendrer des traumatismes surtout chez les tout petits car pour eux, le père et la mère ne sont pas à égalité même si les rôles sont complémentaires.
En effet, le jeune enfant établit, dès les premiers mois de sa vie, un lien particulier, sélectif avec sa mère. Cet attachement lui procure un sentiment de sécurité indispensable à son évolution et à son adaptation sociale.
En pratiquant la résidence alternée, on sépare l’enfant de » sa principale figure d’attachement « . Cela crée chez l’enfant un sentiment d’insécurité. L’enfant devient anxieux à l’idée de se séparer de sa mère, il a besoin de sa présence en toutes circonstances. Les spécialistes constatent des troubles du sommeil, de l’agressivité, des maladies de peau.
Dès que cesse la garde alternée, on s’aperçoit que les symptômes disparaissent.
Pour le Docteur Berger, « si une résidence alternée est mise en place trop précocement, cette base de sécurité est inaccessible à l’enfant pendant une durée trop longue, et l’absence de sentiment de sécurité risque alors d’entraîner la constitution d’un attachement dit désorienté-désorganisé ».
Au vu de ces constats, les spécialistes recommandent la prudence pour la mise en place de la résidence alternée chez les jeunes enfants. Certains, comme le psychologue Gérard Poussin « préfèrent faire jouer le principe de précaution et protéger les bébés d’allers-retours néfastes pour leur développement ».
Il n’y a pas un âge idéal pour démarrer la résidence alternée mais tous les spécialistes sont d’accord pour l’envisager aux alentours de l’âge de 6 ans car c’est la période où l’enfant devient moins vulnérable.
Selon certains experts, pour les enfants plus grands aussi, la résidence alternée est un système très perturbateur et déstabilisant. L’enfant doit gérer en permanence ses affaires entre les deux domiciles, ne pas oublier ses cahiers, ses livres, cette situation lui demande un gros effort d’adaptation.
Si, en plus ses parents ont du mal à se parler sans s’injurier, l’enfant se retrouve alors au centre des conflits.
L’aspect financier n’est pas non plus négligeable, c’est un mode de garde coûteux puisque les parents sont obligés d’acheter en double tous les équipements.
A noter :
Les parents ont intérêt, avant de se lancer dans une garde alternée, à mettre en place une sorte de guide de bonne conduite :
– se forcer à respecter les accords qui ont été passés.
– en cas de problèmes d’horaires, de maladie, ne pas hésiter à prévenir l’autre parent.
– ne pas tenter de voir l’enfant plus souvent que ce qui est prévu.
– ne pas poser trop de question sur l’autre parent.
– essayer de désamorcer les conflits.
Dans le cas ou la résidence alternée échoue, les parents peuvent revoir le Juge et demander que la résidence de l’enfant soit fixée chez l’un des parents. L’autre parent aura un droit de visite et d’hébergement.
– Si les parents s’entendent sur le nouveau mode de résidence, le Juge homologue la décision dans une nouvelle convention.
– Si les parents ne s’entendent pas , c’est le Juge qui statue en fonction des nouveaux éléments qui lui sont apportés.
La résidence alternée et l’Administration
– au niveau de la Sécurité Sociale :
Chaque parent est autorisé à inscrire son enfant sur sa carte Vitale.
– au niveau de la Caisse d’Allocations Familiales :
Il faut indiquer à la CAF lequel des parents sera allocataire.
– au niveau des impôts :
Les deux parents ont le droit de déclarer l’enfant à charge sur leur déclaration de revenus. Ils bénéficient ainsi de 0.25 de part supplémentaire.
* Gérard Neyrand, sociologue auteur du livre : « l’enfant face à la séparation des parents »
Conseil
Avant d’opter pour la garde alternée, essayez une garde classique avec des droits de visite larges pour tester les réactions de votre enfant et voir s’il s’adapte au changement.
Soyez souple, n’hésitez pas à changer de mode de garde si vous vous apercevez qu’il ne convient pas, quitte à le reprendre par la suite. La résidence alternée peut tout à fait correspondre à une période de la vie de votre enfant et ne pas convenir par la suite, tout dépend de sa personnalité et de son âge. Si elle n’est pas imposée à l’enfant, la résidence alternée peut-être une réussite. Faites passer l’intérêt des enfants avant les votre et restez à l’écoute.
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